Partage moi tes fantasmes chéri!

Qu’est-ce qui t’excite dans le sexe toi?

Si tu vas consulter un sexologue psychothérapeute, on va probablement éventuellement te poser cette question. Un peu intrusif, malaisant de répondre à une question aussi intime à un étranger qui te connaît depuis quelques heures. Parfois, on ne sait pas trop quoi répondre ou qu’elle est la « bonne » réponse que notre sexologue veut entendre pour être considéré comme normal.

C’est d’ailleurs la réponse qu’on m’offre souvent: « Ben…là! Rien d’anormal là…euh. Les choses traditionnelles, typiques, mais rien de plate par contre là… » La crainte de se faire juger sur nos fantasmes sexuels est très prévalente de manière générale chez les individus. On craint ce que les autres vont penser de nos fantasmes et ce à quoi notre corps réagit sexuellement.

 

Pourquoi poser la question?

Parce que tes préférences sexuelles en disent beaucoup sur toi. Comment tu as été aimé. Comment tu aimes les autres. Quelles sont tes insécurités, tes blessures émotionnelles. Quelles sont tes forces et limites dans la sexualité. Où sont tes blocages sexuels. Quel type d’éducation sexuelle as-tu reçue. Tout pour qu’une personne soit vraiment à l’aise de se dévoiler! (lire sur un ton sacarstique).Évidemment, le but n’est pas de juger négativement, mais aider à vivre une sexualité sans « trop » de blocage.

 

 


« Dis-moi comment tu fais l’amour et je te dirai comment tu as été aimé. »

– Ester Perel


Le fantasme lui-même n’en dit pas vraiment beaucoup sur toi. C’est plutôt la signification que tu y apportes et les éléments qui t’excitent plus spécifiquement. Le sexologue psychothérapeute remarque et reflète des observations qui peuvent indiquer des aspects qui peuvent « nuire » à ton plaisir et ta satisfaction. Les fantasmes et préférences sexuelles sont construits selon nos expériences relationnelles et sexuelles du passé. On érotise souvent des blessures ou des triomphes vécus. Notre imaginaire sexuel est un endroit où on se sent en contrôle de la situation, où on peut se laisser pleinement libre d’explorer les sphères de la sexualité, sans danger. Un espace où personne n’a accès au contenu. Bref, un petit jardin secret!

Doit-on partager nos fantasmes avec nos partenaires?

Même entre sexologues psychothérapeutes, nous ne sommes pas d’accord sur la réponse à cette question. CertainEs vont privilégier d’avoir un certain jardin secret, d’autres suggèrent fortement le dévoilement, mais seulement des fantasmes qu’on ait à l’aise de partager.

Peut-on vraiment être honnête et pleinement authentique avec notre partenaire si on se refuse de dévoiler ses fantasmes? Peut-on vraiment prétendre que l’autre nous connaît pleinement, si on n’ose pas se mettre à nu face à notre amoureux-se? Quelle amélioration le jardin secret sexuel procure-t-il à la sexualité du couple? Peut-on nuire à la sexualité du couple en dévoilant ses fantasmes?


« Une personne qui s’accepte soi-même et assume sa sexualité dans toutes ses formes va préférer être connue et rejeter plutôt que d’être acceptée pour ce qu’il/elle n’est pas réellement. »


Il est clair que dévoiler ses fantasmes vient avec son lot d’émotion et de signification comme il a été énuméré plus haut. L’être humain a deux désirs fondamentalement opposés. Il veut être connu et partager son soi intérieur, mais il veut aussi être accepté, aimé, apprécié par les autres. Ces deux désirs peuvent être congruents parfois, mais les fantasmes viennent souvent les mettre à l’opposé dans une relation amoureuse. On veut tellement les partager avec l’autre, mais le risque de ne pas obtenir l’acceptation est souvent trop grand.

L’intimité à son plus profond

Partager un fantasme, c’est un moment d’intimité. L’intimité étant définie comme un dévoilement de soi où notre partenaire découvre une nouvelle information de notre personne. Quand on se dévoile, on prend toujours un risque que l’autre nous apprécie moins, nous rejette ou refuse d’accepter cette partie de soi. Une personne qui s’accepte soi-même et assume sa sexualité dans toutes ses formes va préférer être connue et rejetée que d’être acceptée pour ce qu’il/elle n’est pas réellement.

L’image qu’on projette de soi

Pour se sentir accepter, on filtre l’information qu’on offre pour être perçu sous un bon angle. On cache nos défauts ou les parties de notre sexualité qui nous gêne. On fait plus confiance à l’opinion de notre entourage pour définir notre valeur que se baser sur ses propres perceptions de soi. Une intimité qui est validée par l’autre, où on ne laisse connaître seulement les parties de sa sexualité qu’on accepte ou que l’autre acceptera. On stagne alors dans la sexualité, car une partie de celle-ci reste dans la noirceur pour se protéger des jugements et du rejet.

Vomir son intimité

Partager un moment intime et être pleinement authentique, ce n’est pas tout dire d’un coup. J’appelle plutôt cela vomir son intimité que du partage. Il y a un avantage à ne pas tout dévoiler immédiatement, car cela maintient un mystère et une nouveauté à découvrir dans l’exploration de la sexualité avec notre amoureux-se sur le long terme. Il y a souvent un désir caché d’être accepté dans le vomissement de son intimité. Cela permet d’éviter de s’engager et s’attacher à une autre personne pour apprendre qu’elle nous rejettera éventuellement.

Le partage d’un fantasme doit être perçu comme un moment de vulnérabilité où l’espace ne sera pas nécessairement sécuritaire. Notre partenaire peut bien réagir et se réjouir de cette préférence sexuelle où il/elle pourrait aussi mal réagir. Toutefois, la réaction de votre partenaire ne détermine pas votre valeur sur le plan de la sexualité. Sa réaction va être plus déterminant de ses propres enjeux que des vôtres.

 

Qu’est-ce que tu aimes dans le sexe toi?

La prochaine fois qu’on vous posera la question, allez-vous être en mesure d’apprécier votre sexualité et vous sentir pleinement libre de dévoiler vos préférences et fantasmes sexuels? Allez-vous filtrer l’information pour éviter le rejet et maintenir une image plus acceptée?

 

 


sexologue montreal

François Renaud M.A.

Sexologue psychothérapeute Montréal

Spécialisé en thérapie de couple

À propos de l’auteur